lundi 13 octobre 2008

"Upside down..."

Je vous invite à visiter une exposition très passionnante sur les cultures polaires, au musée du quai de Branly.
Je ne vous cache pas que dans la production de mes pièces de la série "Ny Alesund pole 0", ces cultures ont servi de références à mon travail... Bien avant cette expositon, mais aujourd'hui elle a le mérite d'exister et c'est une première en France, alors qu'au Canada elles sont beaucoup plus nombreuses...

Article du Monde:




Une des oeuvres présentées dans l'exposition "Upside Down", au Quai Branly.
AFP/FRANCK FIFE
Le visiteur part à la découverte de quelque cinq cents pièces sculptées entre 500 avant J.-C. et 1 200 après, par des chasseurs de phoques et de morses naturellement confrontés à la rareté et à la pénurie des pôles.

"Blanc, translucide, feutré : l'univers des Arctiques (au pluriel) figuré au Musée du quai Branly à l'occasion de l'exposition "Upside Down", qui se tient jusqu'au 11 janvier 2009, a été conçu par le plasticien américain Doug Wheeler, l'un des créateurs du mouvement artistique Light & Space, né à Los Angeles à la fin des années 1960. Avant toute découverte esthétique, "Upside Down", autrement dit "sens dessus dessous", impose la perte de repères, par le plastique translucide et le néon froid. Dès la première salle, nue comme la banquise, le temps est suspendu, la température en baisse.

Une fois dépaysé, le visiteur part à la découverte de quelque cinq cents pièces sculptées entre 500 avant J.-C. et 1 200 après, par des chasseurs de phoques et de morses naturellement confrontés à la rareté et à la pénurie des pôles. Les oeuvres exposées sont magnifiques et rarement vues en France. Elles sont de petite taille pour la plupart, tel cet ours nageant, pièce en ivoire de 14 cm de long et 4 cm de haut, issue de la civilisation du Cape Dorset, au nord de la baie d'Hudson.

Cette sculpture provient de la collection du Canadian Museum of Civilization de Gatineau (près d'Ottawa). Elle est placée au centre d'une farandole de miniatures composée de loutres, d'amulettes en forme de faucon, de morue ou d'oiseau, de dents de chamane, ou d'un éblouissant petit masque de 4 cm au plus long. Ces beautés discrètes et fines sont installées dans trois panneaux extraplats et transparents, en suspension. On pourra donc, comme le voulaient les artistes paléo-eskimo, les regarder par le bas, par le haut, "up and down", selon la cosmogonie du Grand Nord, où différents mondes se superposent et que seul le prêtre chamane peut traverser.

En l'air, sur un écran hyalin, est projeté le Dorset film, réalisé par Edmund Carpenter en 1954. Il y comparait l'art ancien du Dorset aux pièces découvertes en 1913 par le réalisateur-explorateur Robert Flaherty, auteur de Nanouk l'Esquimau (1922). Ce minimalisme ambiant s'accompagne d'un fond sonore conçu avec tact par Philippe Le Goff - conversations en langue inuk, cris d'animaux, souffles...

LOGIQUE GÉOGRAPHIQUE

Plus loin, dans cette exposition que les concepteurs avaient voulue dépourvue de cartels explicatifs (mais le Quai Branly a promis d'en rajouter dans un grand panier), les objets ont été placés selon une logique géographique - à l'est les civilisations Ekven, à la pointe de la Sibérie ; à l'ouest l'Ipiutak, découverte en 1939 à Point Hope, dans l'Alaska canadien ; au centre les cultures dites de l'Old Bering Sea (île Saint-Laurent et les deux rives du détroit). Le site de Point Hope a été fouillé dans les années 1930-1940. Le site d'Ekven fut découvert en 1960, mais les pièces exposées au Quai Branly proviennent de chantiers menés entre 1990 et 2000. Elles appartiennent au Musée d'Etat d'art oriental de Moscou, d'où elles n'étaient jamais sorties.

Doug Wheeler et le scénographe Jean de Gastines ont choisi de les montrer dans des vitrines cubiques, posées sur des socles instables, de niveau variable, représentation de la banquise qui fond. Le commissaire de l'exposition, Edmund Carpenter, cinéaste, anthropologue, collectionneur passionné et spécialiste de l'archéologie des glaces, leur avait demandé d'insister sur la fragilité des cultures "eskimo".

En fondant, les glaces peuvent submerger à jamais, mais aussi dévoiler les trésors du permafrost, et ainsi aider l'archéologie polaire, coûteuse, qui nécessite des partenariats privés - la fondation Total est associée à l'exposition -, et des relations diplomatiques complexes dans une région que les puissances limitrophes veulent partager comme un gâteau.

En 2009, les énormes navires marchands pourront franchir le pôle Nord par le passage du Nord-Est, délivré des glaces par le réchauffement climatique. Que pèsent dès lors ces petites chaînes rituelles ipiutak, admirablement taillées d'un seul bloc dans l'ivoire de caribou ? Que pèse cette tête de harpon ekven, gravée dans un confetti de défense de morse ?

"Upside Down",

Musée du quai Branly. 37, quai Branly, Paris-7e. Mo Alma-Marceau. Mardi, mercredi et dimanche de 11 heures à 19 heures, jeudi, vendredi et samedi, de 11 heures à 21 heures.

Jusqu'au 11 janvier 2009. Tél. : 01-56-61-70-00. 7 €. Catalogue, éd. Musée du quai Branly-RMN, 228 p., 39 €.

A lire : Ultima Thulé, Les Inuit nord-groenlandais face aux conquérants du Pôle (1818-1999), de Jean Malaurie, éd. Le Chêne, 399 p., 45,50 €.

Véronique Mortaigne"

vendredi 10 octobre 2008

Un très beau Nobel

Je ne peux vous cacher ma joie de voir le Nobel de Littérature attribué à JGM Le Clézio.
Vous comprendrez aisément pourquoi...
J'apprécie particulièrement "Raga" et je vous le recommande. Son regard sur l'humanité et ses mondes est d'un rare humanisme et d'une rare poésie...

Valéry Grancher

jeudi 2 octobre 2008

Un nouveau paradis pétrolier


"Artic Vanitas" Fourrure de Rennes du Svalbard, crâne humain en résine et feuille d'or. Valéry Grancher 2008

Un article publié ce jour à Paris dans le quotidien Matin plus (sans commentaire):

"L'avenir de l'Arctique, ce sera moins d'étendues blanches et d'avantage d'or noir, signale un rapport récemment publié au sujet des réserves pétrolières du Grand Nord. Selon la première estimation globale des ressources en pétrole et en gaz situées au nord du cercle polaire, effectuée par des géologues américains, il se pourrait que la région recèle, sous la glace, un cinquième des réserves d'hydrocarbures non encore découvertes mais récupérables de la planète. cela représente 90 milliards de barils de pétrole. Et 47 260 milliards de mètres cubes de gaz, soit environ le tiers des réserves mondiales. Ce rapport fournit les premiers chiffres sûrs en ce qui concerne les richesses en hydrocarbures que les cinq pays riverains de l'Arctique:
- Les Etats Unis, La Russie, le Canada, La Norvège et le Danemark (via le territoire autonome du Groënlande) - convoitent depuis plusieurs années. Attirés par les énormes potentialités économiques de la région, les gouvernements des pays riverains de l'Arctique se préparent déjà à revendiquer leur part des fonds marins pour le cas où, d'ici à une vingtaine d'années, le passage serait libre de glace en saison estivale. L'étude sur les ressources en pétrole et en gaz, réalisé par l'agence gouvernementale US Geological Survey révèle cependant que la plupart des réserves sont concentrées près des côtes, dans la juridiction territoriale des pays concernés. Les réserves situées au coeur de l'Arctique - C'est à dire dans la portion d'océan sur laquelle aucun pays n'exerce actuellement de souveraineté - semblent restreintes.
Mais ce que laisse prévoir le rapport, c'est un avenir très différent pour l'une des dernières régions intactes du monde. S'il y a du pétrole, les pays qui le détiennent chercheront sans aucun doute à l'extraire, quel qu'en soit le coût environnemental. "Il est possible que les vastes plate-formes continentales de l'Arctique constituent la plus grande zone pétrolifère non explorée de la Terre", souligne Donald Gautier, le chef de projet. Selon les estimations de l'agence, plus de la moitié des ressources pétrolières encore non découvertes sont concentrées dans trois zones géomorphiques: L'Alaska arctique (30 milliards de barils), le bassin amérasien (9.7 milliards de barils) et les bassins de l'est du Groënland (8.9 milliards).
Par ailleurs plus de 70 % des réserves non découvertes de gaz naturel se trouveraient, elles aussi, dans trois zones: le bassin de l'ouest de la Sibérie (18 430 milliards de mètres cubes), les bassins de l'est de Barentz (9000 milliards), et l'Alaska arctique (6250 milliards). Les 90 milliards de barils de pétrole que l'on s'attend à trouver dans l'Arctique, excèdent à eux seuls, la totalité des réserves mondiales (86.4 millions de barils jours) pendant trois ans.
Le rapport ne donne pas d'estimations sur le délai d'attente pour l'arrivée de ces ressources sur les marchés, mais il est clair que l'opération ne se fera pas du jour au lendemain. Il faudra, par exemple, une dizaine d'années sans doute ou d'avantage pour pouvoir commencer à exploiter les gisements dans le Golfe du Mexique et au large de l'Afrique occidentale. Mais il est évident que l'énorme quantité d'infrastructures industrielles auxquelles il faudra faire appel pour découvrir le pétrole, l'extraire et le transporter aura un coût environnemental colossal. Alors que les leaders démocrates des deux Chambres du Congrès ont rejeté, le 14 Juillet, une proposition du président Bush visant à lever le moratoire de 25 ans sur le forage dans la plupart des eaux côtières, les patrons des compagnies pétrolières américaines appellent à un assouplissement des réglementations interdisant le forage offshore - y compris dans une bonne partie de l'Alaska. Maintenant, les demandes pourraient bien aboutir."

Michael McCarthy
The Independent, Londres